Manifestation en août 2006, réclamant que Exxon nettoie les plages et qu’il paie pour les dommages.
Un des meilleurs films que j’avais vu aux Rencontres Internationales du Documentaire de Montréal au mois de novembre sera aussi présenté cette semaine au Festival des Films sur les Droits, aussi à Montréal, et sera également diffusé à Radio-Canada la semaine prochaine. Le film est le produit d’un travail d’enquête de longue haleine, réalisé par Robert Cornellier dans le cadre de l’excellente maison de production Macumba International – dont je vous reparlerai au cours des prochaines semaines. Black Wave raconte la choquante histoire de l’impact environnemental dévastateur de l’accident du pétrolier Exxon Valdez en Alaska et la lutte des communautés affectés pour des réparations et une compensation adéquate. Je me suis entretenu avec Robert Cornellier.
Cette histoire est choquante. A-t-elle été bien couverte par les médias ? Aux États-Unis notamment ?
Il y a eu une grande couverture médiatique au moment de la catastrophe en 1989. Des journalistes et des caméras du monde entier se sont rendus sur les lieux pendant quelques mois. Puis cette histoire est tombée, peu à peu, dans l’oubli. Il y a eu un regain d’attention, principalement en Alaska, au moment du 10e anniversaire. Quelques bons articles faisant un bilan des conséquences ont été publiés. Puis c’est tombé dans l’oubli. J’ai commencé à couvrir cette histoire en 2004, lors du 15e anniversaire. Riki Ott et un groupe de citoyens de Cordova ont alors organisé une conférence de presse et quelques événements à Washington DC pour attirer l’attention sur leur cause, mais il n’y a pratiquemment pas eu de couverture. À peine quelques lignes provenant d’agences de presse. Finalement il y a eu une petite attention apportée par les médias lorsque la cause a été entendue à la Cour Suprême. Mais aucun papier d’analyse ou reportage de fond sur cette question. Pourtant les conséquences de ce jugement sont très importantes pour l‚avenir. Les citoyens américains viennent, ni plus ni moins, de perdre toute forme recours contre les compagnies pétrolières en cas de déversement pétrolier.
J’ai beaucoup aimé le film, seulement j’avais l’impression qu’on racontait beaucoup des événements du passé plutôt que de les vivre au moment ou les choses se passaient. Les événements se sont déroulés sur quelle période, et tu as tourné sur quelle période ?
J’ai commencé à travailler sur cette histoire en janvier 2004. La catastrophe datait déjà d’il y a 15 ans. À Cordova, le village de pêcheurs où nous avons tourné, les gens ne voulaient plus parler de cette histoire. Ils voulaient simplement reprendre leur vie en main et tourner la page sur le passé. Et la saga judiciaire était rendu au niveau de la Cour d’Appel (9th Circuit Court), et traînait depuis plusieurs années. La difficulté qui s’est posé, c‚est qu’il ne se passait pas grand chose. Le tournage de Black Wave a débuté en août 2006 avec la manifestation de bateaux juste en face du village. Ce fut la seule qu’il y a eu au cours des deux années du tournage. J’ai été constamment à l’affût d’événements. J’ai fait une douzaine de voyages en Alaska. Nous sommes allés pour le carnaval, pour la fête du 4 juillet. À chaque fois que j’apprenais que quelque chose allait se dérouler dans le village ou ailleurs, je m’y rendais. Il faut dire aussi, que du mois d’avril jusqu’au mois de septembre, toute la vie s’articule autour de la pêche. Le village est alors très tranquille. Puis au cours de l’hiver, une grande partie du village se vide, parce que beaucoup de pêcheurs et leur famille vivent ailleurs où ils gagnent leur vie parce qu’à Cordova il n’y a rien. Ce fut donc un réel défi de parler de cette histoire et d’essayer de la rendre vivante, parce qu’il ne se passait pas grand chose.Comme il y a eu beaucoup de déplacements, il fallait aussi faire des choix pour essayer de garder les coûts de production le plus bas possible. Il y a une partie du tournage où j’étais seul, c’est-à-dire que je réalisais, faisait la caméra et le son. Au cours de ce tournage j’ai réalisé à quel point c’est difficile de parler d’événements qui se sont déroulés dans un passé récent mais qui ne sont plus dans l’actualité, tout en essayant de les rendre le plus vivant possible.
Equipe: Une partie de l’équipe de tournage à Cordova: de la gauche: Robert Vanherweghem, dir. photo; Riki Ott; Paul Carvalho, co-producteur et scénariste; Robert Cornellier, réalisateur et co-producteur.
Thanks to Jorge Bustos-Estefan for help with this blog.